Victor Etienne, cofondateur du Gal « L'INDÉPENDANCE, C'EST SACRÉ POUR UN AGRICULTEUR »

Il faut retourner dans les années 1979-1980. « Déjà à l'époque, l'esprit des coopératives s'éloignait de celui des paysans fondateurs, se souvient Victor Étienne. Les directeurs avaient tous les pouvoirs, les administrateurs n'avaient pas leur mot à dire. Dans ma coopérative, on parlait de déshydrater du maïs. » Révolté par ce non-sens économique, il préfère la quitter. « À Loudéac, il y avait trois coopératives. Nous avons essayé en vain d'en regrouper deux. » Questions de personnes encore une fois. « Avec quelques collègues, nous avons réfléchi : nous, agriculteurs, devions reprendre les rênes. »

VRAI ESPRIT COOPÉRATIF

« Rien n'est plus fort qu'une idée quand elle vient en son temps », rappelle cet homme posé citant Victor Hugo. Le temps était venu. » Le Groupement d'achat de Loudéac (Gal) est né avec un fil conducteur : supprimer les intermédiaires pour retrouver un meilleur prix. En 1979, les premières livraisons d'engrais ont eu lieu directement dans les fermes. Avant, les agriculteurs allaient chercher leurs produits au dépôt de la coopérative et c'était le gérant qui décidait de tout : engrais, phytos, semences…

« NOTRE FORCE : LE PRIX »

L'objectif du groupement est d'acheter en commun les produits nécessaires à l'exploitation afin d'obtenir des prix compétitifs et identiques pour tous, quelle que soit la quantité demandée. Ensuite, le groupement a réussi à perdurer, contrairement à d'autres, car il a été porté par la technique. « Bien acheter un produit est une chose, mais savoir l'utiliser en est une autre. Lors d'un voyage dans la Beauce en 1981, nous avons réalisé que si nous maîtrisions les techniques d'élevage, nous avions beaucoup à apprendre sur les cultures. » Ils ont été les premiers à perfectionner la technique de pulvérisation, ou encore à réaliser des épandages d'amendements humides. Les premiers également à parler réduction des doses de phytos.

TRAVAILLER AVEC DES PRESTATAIRES

Aujourd'hui, le groupement d'achat compte 1 200 adhérents, vingt-trois secteurs et un agriculteur responsable à la tête de chacun d'eux, 23 000 tonnes d'amendements, quinze épandeurs, 5 000 tonnes d'engrais, 15 000 doses de maïs, 500 tonnes de produits d'hygiène. Au total, 5 % du chiffre d'affaires de l'agrofourniture bretonne. Le groupement de Loudéac s'est structuré en SARL mais, au début, les fondateurs apportaient leurs exploitations en caution.

La partie administrative et technique est gérée par un prestataire, Agri-Tech Service, la logistique et la facturation par Agri.com. Fidèle à l'esprit fondateur, chaque adhérent décide du choix de ses produits.

Son seul regret : « On n'a pas investi la mise en marché de nos productions. Demain, la survie passe par là. Le temps est venu. Tout reste à inventer ! »

ISABELLE LEJAS